LA PESEE de votre machine

le Sujet qui fâche

La balance n’est pas seulement l’emblème de la justice ou le signe astrologique. Non, la balance peut aussi être l’arbitre, voire même le juge qui prononcera froidement sa sentence chez l’épicier, ou à l’âme nue et esseulée devant son miroir de salle de bain… Elle est comme ça la balance et elle peut même s’attaquer à vous, ou plus précisément à votre ULM adoré sur votre aérodrome habituel ou sur une base plus occasionnelle. Sans prévenir, sans négocier, juste pour le plaisir, ou disons le sans trop exagérer, pour votre sécurité et celle des autres. Pour certains d’entre vous, ce n’est même pas un sujet. Tout est dans les règles, au gramme près. Le sac à main est pesé avant chaque vol et dans un souci d’optimisation, les pages complétées du carnet de vol sont arrachées pour archivage et le crayon de bois est soigneusement coupé en deux. Ok, c’est parfait mais pour les autres… Je pense à ces pilotes (peu nombreux bien entendu) pour qui “masse maximale au décollage”, “masse à vide de référence” ou encore “fiche de pesée” sont de vagues notions auxquelles ils n’ont pas vraiment porté attention.

« Alors pour ces pilotes et pour les autres, Kambouis a enquêté et va vous étaler, une nouvelle fois, sa sciencinette ! »

Commençons par le commencement


Ultra Léger Motorisé est un type d’aéronef régi par ce que l’on appelle dans le jargon une “technic box”. Pour être plus clair, on définit des critères techniques qui forment les côtés d’une boîte et si on arrive à entrer dans cette boîte c’est que l’on est un ULM ! CQFD L’un de ces côtés est relatif au poids de l’appareil (à la masse plus exactement…). En même temps, pas vraiment surprenant quand l’objet s’appelle “Ultra léger”.

Pour être un ULM il faut donc respecter un critère de poids qui varie suivant la classe, le nombre d’occupant de l’aéronef et certaines options (Sinon cela aurait été trop simple).

Pour la suite de l’aventure et pour que cela soit plus parlant pour tout le monde. Nous allons prendre l’exemple d’un multiaxe biplace avec parachute soit 525 kg.

Ces 525 kg correspondent donc à la masse maximale. Sa définition exacte est : masse maximale de l’ULM autorisée au décollage. Autrement dit, c’est le poids maximum que peut atteindre un ULM au moment où il est prêt à décoller, avec les occupants à bord, les bagages, le lest amovible (s’il y en a) et la quantité de carburant nécessaire au vol. Si vous êtes au dessus, vous êtes hors la loi.

Mais ce n’est pas tout… La conception de l’aéronef va elle aussi imposer des limites. Le constructeur va réaliser différents tests et calculs pour définir ce que la machine est capable de supporter. Soit cette valeur est au-dessus de la limite légale, il faudra dans ce cas s’en tenir à la loi, soit elle est en dessous et c’est, à ce moment-là, elle qui prime. Cette info est notée sur la fiche d’identification de l’appareil.

Dans notre cas, nous admettons que la limite structurelle de la machine est bien supérieure (ce qui est généralement le cas), il sera donc noté sur la fiche d’identification : 525 kg.

Si, à ce moment-là de l’article, vous pensez avoir toutes les infos, vous vous trompez ! Il faut maintenant se mettre à la place d’un constructeur de série qui cherche à réaliser un appareil pouvant convenir au plus grand nombre. Il va donc devoir penser au pilote de 60kg tout mouillé mais aussi à celui qui peut allégrement dépasser le quintal (même à sec…). Il doit penser au petit vol du dimanche matin se résumant dans la plupart des cas à faire trois tours de piste et au vol les plus long pouvant dépasser les frontières de notre cher hexagone. Comment faire une moyenne avec tout ça pour définir le poids de la machine à vide. Heureusement la loi est là et a pensé à tout !

Bienvenue dans la deuxième notion capitale : La masse à vide maximale Au sens de l’arrêté du 23 Septembre 1998 (La loi donc), la masse à vide maximale est la masse que ne doit pas dépasser un ULM à vide. Cette notion de vide est caractérisée par un aéronef auquel nous ôtons les occupants, les bagages, le lest amovible (s’il y en a) et le carburant. La loi stipule qu’une capacité d’emport minimale doit être respectée. Bien évidemment, il a fallu établir une règle pour conserver la possibilité d’y mettre des gens et de l’essence dans ces maudits ULM ! Cette capacité d’emport est donc le delta entre la masse à vide maximale et la masse maximale. Elle correspond à la masse cumulée des occupants, du carburant, du lest amovible (si besoin) et des bagages.

ll est régie (législativement parlant) par les valeurs arbitraires suivantes :

IMPORTANT : Pour les ULM classes 3, 4 et 6 dont la fiche d’identification continue à respecter les conditions de l’ancienne version de l’arrêté : Quantité minimum de carburant = 1 heure d’autonomie

Consentons que la capacité des réservoirs de notre multi-axe est de 90 litres, la capacité d’emport minimum imposée par la loi sera de 156 + (45 x 0,7) = 187,5 kg. Par déduction, La masse maximale à vide sera de 525 – 187,5 kg = 337,5 kg.

Mais d’où vient-il ce 0,7 ? Bien observé ! Effectivement, nous recherchons une masse donc il faudra convertir un volume de carburant (en litre) en masse de carburant (en Kg) et comme la nature n’est pas toujours bien faite, la densité du carburant n’est pas égale à 1… Et non ce n’est pas de l’eau ! Les valeurs retenues par l’arrêté seront, pour l’essence de 700 g au litre et pour le gasoil ou le Kérosène de 800g au litre d’où l’opération 45 x 0,7 pour obtenir une masse de 31,5 kg pour 45 litres d’essence.

Pour en finir avec cette masse à vide maximale, la même logique s’impose. Si les capacités structurelles de la machine sont supérieures, on retiendra 337,5 Kg. Si elles sont inférieures, ce sont elles qui seront prioritaires. Cette info est également présente sur la fiche d’identification de l’ULM.

Plus que deux notions et nous passons au concret (Courage !) Effectivement, nous venons de déterminer les limites admissibles que ce soit par la loi ou par l’appareil lui-même mais une limite n’est pas une valeur réelle. C’est simplement une barrière à ne pas dépasser. Pour connaître la masse réelle d’un ULM il faut se référer dans un premier temps à la documentation du constructeur : c’est ce que l’on appelle : la masse à vide de référence. Il faut bien comprendre que la masse d’un ULM à vide va indéniablement jouer sur sa capacité d’emport. Plus l’ULM sera léger, plus il y aura possibilité d’y entasser des pilotes, des bagages et du carburant. C’est donc un critère commercial très important et les constructeurs l’ont bien compris ! Ont-ils le droit d’annoncer n’importe quoi ? non ! un peu? non ! non ! et non !! La loi leur impose que la masse à vide de référence soit établie sur un ULM en état de vol et que cette configuration soit facilement reproductible.


C’est tout ? Bah ouais…. Qu’est-ce qu’un état de vol…. Qu’est-ce que la facilité… telle est la question. C’est la seule phrase présente dans l’arrêté à ce sujet. ce ne sont que des mots sans valeurs et soumis à interprétation. Et croyez moi, de l’interprétation et de l’imagination, nos constructeurs n’en manquent pas ! Globalement, ils épurent la machine. On enlève tout ce qui n’est pas indispensable, les instruments ? au minimum. Les doubles commandes ? non monsieur, Les portes ? On enlève. Les ailes ? On enle… Ah non, les ailes on garde, on est obligé… Vous conviendrez aisément que cette notion de masse à vide de référence ne vous sera d’aucune utilité. Elle n’existe que pour embellir les brochures commerciales et c’est pour cela qu’il est obligatoire et impératif, à l’acquisition d’un ULM neuf ou d’occasion d’obtenir une fiche de pesée qui atteste du véritable poids de l’appareil. C’est ce que l’on appelle tout simplement la masse à vide et vous me croirez ou non mais c’est la seule valeur qui n’est pas présente sur la fiche d’identification d’un ULM…

Quelle solution pour ôter tous nos doutes sur le sujet ?

Et bien, chers lecteurs, nous n’avons pas beaucoup d’options. Si vous avez un doute sur ces mesures, il faut passer à la balance ! Théoriquement, vous devez avoir, dans le classeur dédié à votre ULM (Oui, le gros, généralement noir ou rouge, dans lequels s’entasse tout plein de feuilles souvent plus volantes que l’ulm lui même…) une fiche de pesée qui vous a été remise au moment de l’aquisition de ce dernier. Vous ne la retrouvez pas ? Vous avez un doute sur les valeurs annoncées ? N’hésitez pas à réaliser l’expérience vous-même

Pour ce faire, vous trouverez sur le site : ecologie.gouv.fr, après avoir navigué dans une multitude de sous-menus (au plus simple : recherche Google = ULM Démarche pour les particuliers) la liste des documents applicables (mise à jour) concernant la réglementation ULM. Dans les formulaires associés, vous y trouverez le R8-ULM-F202 : Fiche de pesée. Le cas d’aujourd’hui, pour illustrer notre article, sera un autogire toujours sous la réglementation antérieure à 2019, sans parachute et sans flotteurs. Au moment de la pesée, l’autogire contient 15 litres de carburant.

Les documents nécessaires à l’opération sont principalement : La fiche de pesée, la carte d’identification, la fiche d’identification et le manuel de vol.

La carte d’identification n’est utile qu’à vérifier si le code d’identification est bien celui de la fiche d’identification associée. (Croyez-moi, celle-là m’a autant coûté à l’écriture que vous à la lecture) Nous pouvons alors extraire de la fiche, les informations utiles : Masse à vide maximale et Masse maximale.

Enfin, le manuel de vol nous indiquera la quantité inutilisable de carburant de l’ULM. C’est la quantité qui restera dans l’appareil même après vidange des réservoirs (l’essence présente dans le circuit, dans le filtre, etc..) . Cette quantité a une masse qui fait partie intégrante de la masse à vide de l’appareil.

Dans notre cas : 1,5 L de carburant soit 1,5 x 0,7 = 1,05 kg

La Pesée

A ce moment de l’opération, il faut être équipé de trois balances (une par roue) de taille et de capacité suffisantes pour accueillir l’ULM. Si vous ne disposez pas de ce type de matériel, rapprochez vous d’un club ou d’un atelier de maintenance. (J’en connais un en Vendée qui se fera une joie de vous aider…

Préparez la machine à la pesée. Otez tout effet personnel (casque, papiers, sacoches, support téléphone, etc…) et évaluez, le plus précisément possible, la quantité de carburant présente dans la machine.

L’idéal étant de vidanger complètement les réservoirs.

Après remise à zéro de l’appareil de mesure, montez la machine et additionnez les résultats obtenus.


Partons gratter du papier….

La fiche de pesée est relativement bien faite et ne comporte pas de piège ou de difficultés notables. Il y a juste à suivre son déroulement. C’est parti !

Une fois ce résultat obtenu, nous pouvons contrôler deux points. Premièrement, la masse vide de l’autogire (267,35 Kg) est bien inférieure à la masse à vide maximale annoncée par le constructeur ( 284 Kg). Deuxièmement, il est maintenant aisé de calculer notre capacité d’emport réelle qui est de 182,65 Kg

J’espère que ce dossier de poids vous aura permis d’y voir un peu plus clair dans ces notions de masses. En espérant sincèrement ne pas avoir été trop lourd…