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Le Swan de Radu Berceanu

Ce lundi 25 mars, je me suis fait prendre au piège par mon ami Claude Cordelle qui m’a fait venir dans la région champenoise. Le bougre savait pertinemment que je pouvais traverser la France à la promesse d’un café gourmand.

Claude avait cependant autre chose en tête, et dès qu’un repas copieux fut avalé, il n’a pas eu de mal à me traîner chez Arnaud Gilotin, pilote d’autogire, l’ingénieux et véritable Géo Trouvetout de l’aérien.

Nous nous sommes donc rendus dans les locaux de la société Artech’drone qui faisait une présentation de ses innovations… 

Il n’y a pas à tortiller, Artech’drone c’est du sérieux… Un domaine de compétences dans l’aérien qui va du R22 turbinisé, au drone gros porteur full carbone, l’autogire bien sûr, et même un hélicoptère contre-rotatif maison.

Cependant, ce qui intéressait particulièrement Claude, c’est cette version électrique du Swan, un ULM monoplace composite, conçu par Radu Berceanu (AVI Aircraft) et électrifié par Arnaud Gilotin (Artech’drone).

La présentation s’est faîte devant un parterre d’invités triés sur le volet. Il y avait du beau linge, ça ne fait pas de doute.

Au milieu de cette quarantaine de spectateurs, il y avait bien deux ou trois colonels de l’armée française, monsieur le préfet, le responsable de la direction des sapeurs pompiers, deux trois députés, et même le président du conseil régional Grand Est, Franck Leroy, (homme charmant qui a pris le temps de venir saluer amicalement toutes les personnes présentes, votre serviteur inclus).

Bref, il y avait tellement d’huiles qu’on aurait presque pu faire une vinaigrette.

La présentation s’est très vite focalisée sur les différents drones assemblés par Artech’drone.  Le niveau de stress de notre hôte Gilotin devait atteindre son paroxysme mais le brave n’a pas flanché. Bravo à lui pour ce self-control.

Les représentants du monde agricole et viticole ont exprimé leur vif intérêt pour les multicopters, notamment pour les traitement du maïs par trichogrammes.

On a parlé aussi cartographie, prévention des feux de forêts…

Jusque là tout va bien…

Le président du Grand Est a salué l’innovation, parlant d’un marché en plein essor. 30% de croissance annuelle estimée pendant les 20 ans à venir. Le développement économique étant l’objectif numéro 1 de la région.

Sourire béat de l’assistance à l’écoute des chiffres providentiels.

Des drones dans tous les secteurs d’activité. Pour de la livraison ultra rapide, dans l’univers du médical, des drones pour sauver des vies, parfois même pour remplacer la main de l’homme, des drones de surveillance pour la sécurité privée, des drones pour l’intérêt général…

Apparemment il y en a à tous les parfums, vanille, fraise et chocolat…

A ce stade je prenais petit à petit conscience de cette nécessité urgente de mettre plus de drones dans ma vie…

Avant ça, mon existence devait être terriblement insipide.

L’audience applaudissait avec un enthousiasme marqué, et gargarisés par ce plébiscite, les trois képis ont pris tour à tour la parole en lâchant de temps en temps des expressions comme «Compétitivité nationale », «Souveraineté européenne », et même « accident nucléaire »…

(Petit malaise quand même….)

Le colonel en question a mis en avant la nécessité de développer des drones français pour ne pas dépendre de la Chine, des drones AOC en quelque sorte…

Toutes ces perspectives alléchantes semblaient satisfaire l’assistance… 

Les représentants d’Artech’drone se sont alors exprimés sur la lourdeur de l’administration française qui réglemente l’aérien, invitant les élus à plaider en leur faveur devant l’EASA…

Si on veut inonder notre ciel de ces jolies petites machines volantes, il est important de faire évoluer la réglementation. 

Je dois vous faire une confidence, à ce moment là, j’ai un peu paniqué. 

« Et la place de l’Homme dans tout ça?”

Je me suis dit que tous ces cols blancs, tous ces gradés, tous ces gens biens, ils étaient en train de se partager le gâteau, ou plutôt l’espace aérien. En l’occurrence mon bien aimé terrain de jeu. 

Au nom de la sécurité, ou du développement économique, faudrait-il que je fasse une croix sur ce petit bout de ciel qui me donnait tant de plaisir, à moi l’épicurien?

« Christophe, qu’est ce que tu peux être réac’ et égoïste en plus, tu ne penses donc qu’à toi et à tes petits plaisirs aériens??? Grandit un peu, soit un Homme! »

La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres…

Conscient de mon scepticisme, Claude s’est empressé de me présenter Radu Berceanu. Un homme absolument charmant, au regard espiègle, ancien ministre des transports en Roumanie, qui a plaqué la politique pour consacrer le reste de sa vie à une activité hautement plus respectable, la conception d’aéronefs légers.

Un de ses nombreux projets est le Swan, un ULM monoplace composite présenté ici dans sa version électrique…

La Swan est une machine étonnante. Je me demande quand même “Qu’est ce que c’est que cette mode de peindre tout en vert fluo?”

Les polonais nous avaient fait le même coup avec l’Argon d’ABC Flight.  A moins que ça soit la dernière tendance dans les pays de l’Est.

Je vous laisse écouter Radu nous parler de son petit bijou dans la vidéo suivante…

Je ne suis pas certain d’avoir été complètement convaincu sur le coup des drones mais je me suis quand même dit qu’il avait sacrément la pêche papy Radu. 

On espère tous en avoir autant sous la quille à son âge…